Le cloître et ses usages

Espace central de l’abbaye, c’est autour du cloître que s’articulaient les principaux bâtiments monastiques, suivant un ordre symbolique et fonctionnel bien précis. Les galeries qui entourent le jardin central desservaient ces différents espaces et accueillaient de nombreuses activités quotidiennes.

en savoir plus

Au Nord, dans la galerie adossée à l’église, se tenaient les cérémonies spirituelles et liturgiques comme celle du mandatum, lors de laquelle deux moines lavaient les pieds des autres religieux, ainsi que le fit le Christ à ses disciples.

La galerie orientale accueillait les activités d’ordre intellectuel et desservait la sacristie ainsi que la salle capitulaire dans laquelle se lisait, chaque jour, un chapitre de la règle de saint Benoît et où l’on discutait des sujets concernant la communauté. Les frères convers, qui n’étaient pas admis dans cette salle, pouvaient néanmoins se rassembler autour de la porte pour écouter les conversations qui s’y déroulaient. C’est également dans cette galerie que les moines s’adonnaient à la lectio divina, un temps de méditation, de prière et de lecture individuelles prescrit par la règle. Les livres dont ils disposaient y étaient d’ailleurs conservés, dans une niche appelée armarium, encore visible. Elle était autrefois équipée d’étagères et fermée par des volets de bois. Quand le nombre de volumes devint trop important, on les conserva probablement dans la sacristie, puis dans une bibliothèque dédiée à cet usage.

La galerie Sud conduisait au chauffoir, au réfectoire et à la cuisine. Elle était dévolue aux activités domestiques et corporelles. Un escalier menant au dortoir y débouchait également. En face du réfectoire se trouvait un petit pavillon gothique, appelé « lavabo », abritant une fontaine qui alimentait l’abbaye en eau potable. Captée sur une hauteur du village voisin, cette eau de source servait à la nourriture et aux ablutions des moines.

La galerie située à l’Ouest fermait le carré claustral. Elle était pourvue d’une porte donnant sur une ruelle extérieure qui conduisait au cellier et au bâtiment des frères convers, ruelle qui permettait aussi à ces derniers d’accéder à la cuisine et au bas-côté Sud de l’église.

Entre 1793 et 1860, la reconversion de l’abbaye en fabrique textile provoqua plusieurs remaniements dans l’architecture du cloître. La galerie située au Nord fut fermée aux deux extrémités, pourvue de baies vitrées et de cheminées. Elle servit successivement de bureau, de serre et d’orangerie. La galerie Est fut entièrement détruite pour permettre l’ouverture de fenêtres dans la façade du bâtiment qui abritait désormais une filature. Le long de la galerie Sud, le creusement d’un canal souterrain entraîna la destruction du lavabo. La galerie Ouest fut pavée pour faciliter le passage des charrettes jusqu’à la salle où l’on chargeait les marchandises et, à son extrémité, on perça une issue dont on peut encore voir la trace dans la maçonnerie. En 1855, toutes les galeries furent garnies de fenêtres et transformées en ateliers d’impression pour étoffes. Au Nord, la porte charretière fut rebouchée mais on aménagea, dans l’épaisseur du mur évidé, une petite loge éclairée par une fenêtre donnant sur les ruines de l’église. Quant aux larges baies qui communiquent désormais à l’Ouest avec la ruelle des convers, elles ne seront ouvertes qu’au début du XXe siècle.

En 1864, l’abbaye fut rendue à la vie conventuelle. Le cloître fut déblayé des équipements industriels et des restaurations furent rapidement entreprises afin de le rétablir dans ses fonctions monastiques. Ces travaux s’accompagnèrent de nouvelles démolitions. Jugé « anachronique », l’escalier du dortoir rénové par les moines en 1672 et conservé par les industriels fut détruit, et les toitures en appentis des quatre galeries furent remplacées par des terrasses. (La circulation entre les bâtiments en sera facilitée à l’étage, mais on déplorera par la suite de nombreuses infiltrations…).

Après plusieurs campagnes de travaux, le cloître fut définitivement restauré en 2007. Aujourd’hui comme hier, c’est un lieu de vie central au sein de l’abbaye, qui sert désormais d’écrin aux représentations musicales et chorégraphiques proposées par la Fondation Royaumont.

Les travaux de restauration