Jazz Au Fil de l’Oise revient à Royaumont

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En 2018, Jazz Au Fil de l’Oise investissait Royaumont pour un concert gastronomique à quatre mains, mijoté par le flûtiste Joce Mienniel et le chef cuisinier Patrick Derisbourg. Le 8 décembre 2019, le festival revient à l’abbaye, pour un concert du violoniste Théo Ceccaldi et du pianiste Roberto Negro, suivi d’un dîner. Mais, avant cela, deux spectacles présentés à Royaumont sont repris : « Luminescence » d’Amir ElSaffar (le 17 novembre à Gonesse) et « Hâl » de Keyvan Chemirani (le 22 novembre à Vauréal). Isabelle Mechali-Watteeuw, la directrice de Jazz Au Fil de l’Oise, nous explique les raisons de ce compagnonnage…

Pourquoi avez-vous choisi de programmer « Luminescence » d’Amir ElSaffar, un artiste en résidence à la Fondation Royaumont ?

Isabelle Mechali-Watteeuw : Jazz Au Fil de l’Oise est engagé en faveur des musiques de création et des projets inédits, en faveur de la circulation des artistes et des œuvres. Le festival est impliqué dans les échanges internationaux ; il souhaite surprendre et a l’ambition de faire voyager autour du monde. Il souhaite créer des liens avec ses partenaires du Val d’Oise, ouvrir les portes d’entrée pour chaque public, créer des ponts et non des barrières, ce que nous partageons avec Samuel Agard, le conseiller artistique de Royaumont pour les musiques transculturelles.

J’ai eu la chance de pouvoir assister à la première étape de la création d’Amir ElSaffar, « Luminescence », et je souhaite transmettre cette chance au public du festival. Ce trompettiste et compositeur qui a côtoyé notamment Vijay Iyer, invité privilégié de Jazz Au Fil de l’Oise, s’est d’abord impliqué dans la musique noire américaine. Plus tard, il approfondira l’étude du maqâm et en fera sa singularité. Dans ce projet, il invite des interprètes de flamenco faisant partie de l’avant-garde tout en faisant le lien avec la tradition. Je suis impressionnée par Vanesa Aibar, la danseuse de flamenco (elle-même presque percussionniste lorsqu’elle danse, si je puis dire). Cet univers du maqâm et du flamenco, la voix alliée à l’électronique, aux cordes et à la trompette, ces émotions, ces nuances, cette finesse en toute liberté… Oui, je souhaite que le public du festival découvre ou re-découvre Amir El Saffar, musicien de haut niveau dans une formule époustouflante qui a plus que sa place dans le festival.


Le concert d’Amir ElSaffar, lors du Festival de Royaumont 2019

Pourquoi avoir également programmé « Hâl » de Keyvan Chemirani ?

Isabelle Mechali-Watteeuw : Un peu pour les mêmes raisons, à savoir la circulation des œuvres et des artistes… Keyvan Chemirani est régulièrement invité sur l’une ou l’autre édition de Jazz Au Fil de l’Oise. Il y a ici le souhait de « suivre » les projets de certains artistes et de faire de nos scènes une étape. Dans ce projet, nous ferons connaissance avec Maryam Chemirani, à la voix très charismatique. Keyvan, grand percussionniste, est nourri de diverses influences célébrant la vie et le voyage… 


Le spectacle de Keyvan Chemirani, lors du Festival de Royaumont 2018

Enfin, pourquoi avoir choisi l’abbaye de Royaumont comme décor pour le concert de Théo Ceccaldi et Roberto Negro ?

Isabelle Mechali-Watteeuw : Le paysage musical est désormais multiple, riche. L’appétit des créateurs que sont les musiciens de jazz est sans limite. Ils ont soif d’expérimenter et de puiser à toutes les sources de toutes les musiques. Ils aiment explorer, échanger, voyager vers l’autre, ils sont libres : ce sont des improvisateurs. Nous souhaitons rendre hommage à cet état d’esprit et nous choisissons des musiciens authentiques et singuliers. La nature même du jazz, cette “jeune” musique (un peu plus d’un siècle) est de s’approprier toutes les musiques, l’Inde pour Coltrane ou la bossa nova pour Stan Getz par exemple. L’abbaye de Royaumont est une sorte de laboratoire, un lieu unique dans le Val d’Oise, qui offre aux artistes la liberté de travailler, de faire des rencontres, de faire des recherches, de créer, d’exercer leur art. Théo Ceccaldi est une voix singulière de la nouvelle scène européenne, d’une grande sensibilité, plein de fougue et de lyrisme. Il est boulimique de rencontres et de musique. Dans ce duo avec le pianiste Roberto Negro, ils prennent des risques : on ne les trouve pas là où on les attend mais leur musique est empreinte d’élégance et d’audace, tout en étant accessible à tous. Royaumont, le jazz, les musiques improvisées, Théo Ceccaldi et Roberto Negro… Tout cela se rejoint, n’est-ce pas ?